Suite à une campagne de lutte novatrice menée sur un archipel situé sur la côte ouest-africaine, des scientifiques espèrent avoir, pour la première fois, éradiqué les mouches tsé-tsé, agents vecteurs de la maladie du sommeil.



Des chercheurs français, guinéens et britanniques, ont réduit la population de mouches tsé-tsé à des niveaux indétectables sur les îles de Loos au large de la Guinée.


L'équipe a constaté que la vitesse de réduction dans la population est supérieure quand plusieurs méthodes de lutte sont utilisées simultanément, dont le recours à des pièges et des cibles imprégnés de poison, à la pulvérisation sélective au sol, à l'enduisage des porcs avec de l'insecticide, et à la construction de clôtures imprégnées autour des porcheries.


Seuls très peu de programmes de lutte contre les mouches tsé-tsé ont été effectués dans le cadre de la lutte contre la maladie du sommeil en Afrique de l'ouest, selon le chercheur principal Moïse Kagbadouno, haut responsable au ministère de la santé et directeur du programme national de lutte contre la trypanosomiase humaine africaine (THA).


"Si nous réussissons, ce serait la première fois que nous démontrons que l'éradication de ces mouches est possible, et que l'impact est direct parce qu'il stoppe la transmission", explique-t-il.


Kagbadouno ajoute qu'il faut mener une campagne de lutte intégrée parce qu'aucune méthode ne s'est distinguée comme étant la plus efficace. Pour lui, cette expérience pourrait être reproduite dans le reste de la Guinée et dans d'autres pays, et des opérations de lutte dans les principales zones de prévalence de la maladie du sommeil en Guinée, proches de la côte, seront lancées au cours des tout prochains mois.


Chris Schofield, spécialiste des maladies infectieuses et tropicales à la London School of Hygiene & Tropical Medicine, au Royaume-Uni, juge néanmoins qu'il faut poursuivre la surveillance pendant une assez longue période pour s'assurer que toute la population de mouches tsé-tsé a été éradiquée, sinon elle risque de retrouver les niveaux précédents.


Schofield, qui est membre de la Campagne africaine d'éradication de la mouche tsé-tsé et de la trypanosomiase(PATTEC), prévoit le lancement probable cette année d'un vaste projet conjoint d'éradication de la mouche tsé-tsé dans la région du KwaZulu-Natal, le sud du Mozambique et au Swaziland, calqué sur le modèle de l'étude guinéenne.


"Le problème, c'est que la maladie du sommeil est une maladie négligée, et comme telle, elle ne bénéficie pas d'un financement substantiel," explique Philippe Solano, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement en France.


La prise en charge de la maladie du sommeil se fait avec deux médicaments qui posent de multiples problèmes. L'un de ces traitements, le melarsopol, est à base d'arsenic et tue environ 5 pour cent des malades, tandis que l'autre nécessite une longue hospitalisation et n'est pas efficace contre toutes les formes de la maladie. Il n'existe pas de vaccin ou de traitement prophylactique pour cette maladie. Selon les estimations de l'OMS, cette maladie tue environ 30.000 Africains chaque année.


L'étude a été publiée dans la revue Parasites & Vectors le mois dernier (10 février).

Lien vers l'article complet dans Parasites & Vectors  [2MB]


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Un article de Munyaradzi Makoni (Scidev).

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