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Les indices sur matières premières ont un taux de rendement à trois chiffres. Mais les légers écarts de performance sont des indicateurs sur leur volatilité potentielle. Les investisseurs qui ont fait fortune avec les fonds indexés (trackers) sur les indices actions se sont, au fil des ans, réorientés vers les trackers sur indices de matières premières.

Les placements sur cette dernière catégorie de produits sont à hauteur d environ 200 milliards de dollars dans le monde entier. Pour tirer parti de cette demande, une multitude de produits inédits et perfectionnés, qui répliquent la performance des indices sur matières premières, apparaît sur les marchés.

Qu il soit établi depuis longtemps ou nouvellement émis, le fond indiciel sur matière première est une espèce différente de celle de son cousin action. Les investisseurs ne devinent pas que le réveil sera probablement difficile lorsque le boom se terminera.

Peut-être que personne ne se préoccupe pour le moment du fait qu au cours de l année dernière, les trackers sur PowerShares PB Oil et United States Oil ont enregistré des hausses respectives de 106% et 115%. Que représentent 9% de différence lorsque l on a un profit supérieur à 100% ? Les investisseurs doivent toutefois rester attentifs à l étrange fait que deux fonds aux frais de gestions et catégorie d investissement rigoureusement identiques - doux rayonnement du pétrole brut - ont un important écart de performance. Ce n est pas comme s ils achètent une action ou une autre. Le pétrole c est le pétrole, n est-ce pas ?

Enfin, pas tout à fait. Ces produits ne constituent pas un placement direct dans le pétrole mais dans les contrats à termes (ou futures) portant sur le pétrole - contrats qui parient sur le prix futur du pétrole. La façon dont sont placés et gérés ces paris peut faire toute la différence sur les profits réalisés.

Pourquoi ? Parce qu en plus des matières premières qui leur sont sous-jacentes, d autres facteurs influent sur la performance des futures. Depuis que les contrats à terme sont acquis en quasi-totalité sur marge, les fonds doivent mettre de côté des obligations liquides ou du cash à titre de garantie contre d éventuelles pertes. Les intérêts gagnés sur les garanties sont ajoutés au rendement du fond. La garantie est souvent composée de bons du Trésor court-terme ou de cash, mais certains fonds (come Pimco) utilisent des obligations à rendement légèrement plus élevé, qui peuvent booster leur profit.

Beaucoup plus important que le rendement, il existe ce qu on appelle « le rendement nominal » (ou roll yield). C est le rendement positif ou négatif qu un gérant peut obtenir quand il renouvelle sa position soit en vendant un contrat à terme soit en passant d un contrat échu à un nouveau contrat. Les contrats à terme ressemblent plus à des obligations qu à des actions du fait qu il ont des dates de maturité ou d expiration. Lorsque vous achetez un future sur du pétrole, vous n achetez pas au cours du pétrole à aujourd hui - appelé « cours au comptant ». Vous achetez au cours auquel les investisseurs pensent qu il sera dans un mois, deux mois, un an - chaque fois que le contrat arrive à expiration à compter de maintenant. La différence entre l achat de contrats à court terme ou à long terme peut avoir un grand effet sur le roll yield, et donc sur les rendements.

AVOIR UNE VISION LONG TERME

A l origine, la plupart des investissements sur les indices de matières premières plaçaient leurs avoirs dans des contrats à court-terme. La logique : ils pensent qu il est plus facile de négocier et d anticiper des prix actuels. « Les chocs pétroliers et autres mouvements de prix inattendus ont tendance à avoir plus d impact sur les futures court-terme qui sont plus proches des prix comptant », déclare Eric Kolts, gérant d indices sur matière première à Standard & Poor s. Il faut noter que si ce n est pas le cas pour les consommateurs, les chocs pétroliers sont généralement positifs pour les investisseurs en pétrole. Le S&P Index GSCI se positionne principalement sur les contrats à termes d un ou deux mois.

Mais les inventeurs de ce que l on a appelé la « deuxième génération » d indices sur matières premières pensent qu acheter à court terme dénote un manque de recul. « Voudriez-vous investir uniquement dans des bons du Trésor trois mois pour obtenir un portefeuille diversifié d obligations ? » demande Kurt Nelson, responsable chez UBS du marketing des indices US sur matière première. « Probablement pas, et en fait c est ce que les premiers indices sur matières premières font déjà ».

En avril dernier, UBS a émis une série de certificats sur trackers, baptisées E-Tracs, qui répliquent les indices sur matière première par l achat de futures allant de trois mois à trois ans. (Ce sont des obligations dont la performance est généralement liée à un indice de référence). UBS pense qu une approche plus diversifiée permettra d accroître le rendement tout en réduisant la volatilité.

Pour déterminer comment sa nouvelle stratégie va performer, UBS l a validée à l aide de simulations numériques utilisant des données de marché historiques : c est le backtesting. La plupart du temps, les investisseurs expérimentés prennent les validations par backtesting avec des pincettes. En effet, il ya toujours un biais dû à la liberté de choix des données utilisées.


La plupart du temps, les investisseurs expérimentés prennent les validations par backtesting avec des pincettes. En effet, il ya toujours un biais dû à la liberté de choix des données utilisées. Kolts de chez S&P fait parti des sceptiques : « Si je suis amené à construire un nouvel indice, je vais effectuer un backtesting qui m assurerait un calendrier optimal de roll yield ». Nelson indique : « Nous utilisons l ensemble des échéances des futures du marché, et ne les trions pas sur le volet ».

Il est clair qu il y aura des différences significatives entre la façon dont les E-Trac et les autres trackers sur matières premières se comportent. Selon les résultats du backtest utilisant les données du 19 juillet 1998 au 29 Février 2008, le Bloomberg Constant Maturity Commodity Index d UBS a enregistré un taux de rendement annuel de 20,2% au cours des 10 dernières années. Comparé aux 14,3% de l indice S&P GSCI et aux13,4% du Dow Jones AIG Commodity Index (DJAIG), les deux indices les plus populaires, l indice UBS aurait fait aussi bien, avec moins de volatilité.

EVOLUTION EN CONTANGO

Une part significative de l écart de performance est le roll yield et deux autres facteurs qui vont avec : le « contango » et la « backwardation ». Nous allons prendre un exemple pour expliquer ces termes spécifiques. Disons que vous avez un future 1 mois sur pétrole arrivant à échéance en août qui est coté à 100$. Maintenant, vous voulez le renouveler en un contrat à 100$ qui expire en Septembre, mais celui-ci en coûte 110$. Vous perdez 10$ au moment où vous achetez le future Septembre. Lorsque cela se produit, - lorsque les prix des contrats avec des plus longues échéances sont plus élevés que celles des échéances plus proches  on dit que le contrat est « en contango ». L inverse peut être vrai aussi, bien sûr. Le contrat août pourrait être à 110$ et le contrat Septembre à 100$. Alors, vous gagner 10$ quand vous achetez le contrat Septembre. C est ce qu on appelle la « backwardation ».

Qu est-ci conduit à ces deux scénarios ? Beaucoup de facteurs influencent les prix anticipés du pétrole. Parmi eux, il peut y avoir le poids des 200 milliards de dollars de placement sur les trackers matières premières qui proposent simultanément les cours d achats des contrats tous les mois. La concurrence peut faire monter les prix. Cela rend la mise au point des stratégies plus onéreuse pour les fonds et donc réduit les rendements. Kolts de chez S&P estime que le marché est assez grand pour gérer ces flux sans que cela affecte de trop les prix. Nelson de chez UBS a toutefois déclaré : « Je pense qu il est important de noter que c est quand beaucoup d argent a commencé à circuler dans les indices DJAIG et GSCI en 2005, que leur baisse de performance a commencé de façon significative ».

UBS pense qu il peut faire mieux que ses pairs en achetant des contrats à long terme sur plusieurs mois - en évitant ainsi la précipitation. Cela permet également de renouveler ces futures tous les jours pour assurer une transition harmonieuse vers les contrats de plus longue maturité. Les plus vieux indices passent généralement au prochain future une fois par mois sur une période de cinq jours.

UBS n est pas le seul à utiliser une nouvelle stratégie avec son tracker matière première. Deutsche Bank a développé des trackers et des certificats sur trackers qui utilisent ce qu il appelle une stratégie de « rendement optimal ». « Au-delà d un renouvellement mensuel automatique par le future du mois prochain, le fond de la Deutsche Bank étudie une gamme beaucoup plus large de contrats qui couvrent les 13 prochains mois », explique Kevin Rich, directeur général des produits d investissement à la Deutsche Bank. Ils calculent le meilleur potentiel de rendement nominal  un peu comme s ils choisissaient des obligations à plus haut rendement. Comme pour les produits d UBS, le backtesting des indices de Deutsche indique qu il bat ses concurrents haut la main.

Mais les marchés ont une façon particulière de rythmer les choses. Prenez le tracker United State Oil, cité précédemment. Il investit dans les futures plus courts termes et est déjà meilleur que PowerShares DB Oil, qui utilise la stratégie de rendement optimal de la Deutsche Bank. Pendant que le backtesting de l indice de la Deutsche Bank montrait que son rendement a presque doublé celui de ses pairs, un changement dans la forme de la courbe des futures l année dernière a annihilé sa stratégie. De toutes façons, avec des taux de rendement à trois chiffres, personne ne s en soucie  pas encore.

Analyste sur Nextafrique.com.

L. Trame a travaillé au sein de plusieurs banques d'investissements de la place de Paris. Ses centres d'intérêts sont l'économie, la finance de marché et les nouvelles technologies.