L’ambiance était celle des grands jours, hier, mardi 19 mars 2013 dans la cité sainte du Vatican et l’évènement, de taille : la messe inaugurale du pape François. Une célébration qui introduit de plain-pied l’ex-cardinal Jorge Mario Bergoglio dans l’exercice effectif de son pontificat. L’équivalent, côté pouvoir temporel, du rituel républicain de prestation de serment d’un chef d’Etat.

Ce fut donc, en plus des centaines de milliers de fidèles, au moins  130 délégations étrangères dont 31 chefs d’Etat, qui ont accouru  des quatre coins de la planète pour assister de visu à l’entrée en fonction du chef de l'Eglise catholique universelle.

Ce rassemblement, Place Saint-Pierre, du gotha des dignitaires du monde entier, parmi lesquels le vice-président américain, Joe Biden, a donné lieu à un dispositif sécuritaire rarement déployé dans la Ville Eternelle : mobilisation de 3000 membres des forces de sécurité, positionnement de tireurs d’élite sur les toits, balai d’hélicoptères, patrouille de vedettes fluviales sur le Tibre, et interdiction de survol de la capitale Rome. Autant dire un supplice pour ce nouveau pape qui entend marquer son pontificat du sceau de la simplicité et de la proximité avec ses ouailles.

Mais comme il est de coutume à l’occasion de pareilles cérémonies, certaines présences font polémiques. Celle du président taiwanais, Ma Ying-Jeou, à la messe inaugurale de François, comme on pouvait s’y attendre d’ailleurs, fait grincer des dents du côté de la grande Chine.  Taiwan est, depuis les années cinquante, comme la pomme de discorde entre l’Etat catholique et le pays de Mao.

La Chine ne voit jamais d’un bon œil la reconnaissance de souveraineté que le Vatican accorda à cette rivale qu’elle rêve d’annexer. Signe de la crispation des relations intervenue depuis entre le Saint-Siège et le pays de Mao, la nationalisation de l’Eglise catholique chinoise. Si fait que désormais,  c’est Pékin qui nomme les évêques de la communauté catholique de tout le pays. Autant dire un schisme entre  Place Saint-Pierre et Place Tian’anmen. Que le président taiwanais se rende à cette fête inaugurale du pontificat du pape François  n’est pas fait pour sceller une quelconque réconciliation entre Rome et Beijing, du moins dans l’immédiat.

Autre présence très remarquée à cette messe inaugurale : celle du Zimbabwéen  Robert Mugabe himself.

Inamovible chef d’Etat devant l’Eternel et président-directeur fondateur du Zimbabwe, pour reprendre l’expression fétiche de l’humoriste attitré de RFI, Mamane, Papy Bob était, lui aussi, de la grand-messe vaticane ! La chose fait jaser !

Voici un homme littéralement vomi par l’ensemble des Européens au point qu’il est non grata sur le vieux continent et qui décide tout de même d’aller communier avec ses contempteurs.  Il le fait, d’ailleurs, sûr de son bon droit : le vieux Bob pour être un dictateur impénitent, n’en est pas moins un ancien séminariste jouissant de la bonne réputation d’un fervent catholique pratiquant. Dont acte.

Si en matière de démocratie il a des leçons à recevoir de la part de certains de ses pairs présents à la cérémonie, dans le domaine de la foi chrétienne, on ne peut pas en dire autant.

Reste à savoir si le pèlerinage entrepris au saint des saints du catholicisme saura  au reclus de Harare une certaine grâce dont il aura sans doute besoin pour instaurer plus de flexibilité et de gouvernance démocratique dans ce pays qu’il dirige d’une main de fer depuis …1980 !

Et pourquoi pas ? La foi permet de déplacer des montagnes, c’est connu, et c’est bien ce qui permet de garder espoir.  Mais il se trouve aussi que la grâce divine se greffe sur la nature humaine…pour l’élever (quand elle le peut). Et là, le doute semble permis ! Car, on ne se refait pas à 89 ans. Malheureusement !