Alors que le financement d'État prend fin, l'Agricultural Development Bank, au Ghana, se réorganise pour mieux répondre aux attentes du secteur agricole. La stratégie de spécialisation est renforcée, de nouveaux produits sont créés, le réseau d'agences renforcé. Pour développer son action, la banque doit impérativement trouver des financements complémentaires.

Alors que le financement d'État prend fin, l'Agricultural Development Bank, au Ghana, se réorganise pour mieux répondre aux attentes du secteur agricole. La stratégie de spécialisation est renforcée, de nouveaux produits sont créés, le réseau d'agences renforcé. Pour développer son action, la banque doit impérativement trouver des financements complémentaires.

La vocation de l'Agricultural Development  Bank  (ADB) à sa création était de fournir des services d'intermédiation financière à moyen et long terme et des services connexes au secteur agricole et agroalimentaire  afin  de  renforcer  l attrait de  l agriculture  en  modernisant  son  fonctionnement,  de  créer  des  emplois,  surtout en milieu rural, d approvisionner les industries locales en matières premières, de fournir  des  devises  et  d améliorer  le  niveau  de vie des personnes travaillant dans le secteur.

Dans  un  premier  temps,  le  financement  a été en grande partie assuré par l État et des bailleurs  de  fonds  multilatéraux  et  bilatéraux. Les fonds étaient rétrocédés à des agriculteurs  afin  de  réaliser  des  projets  de  production et transformation dans les secteurs, avicole, hévéicole, oléicole (huile de palme) et la  pêche,  et  plus  particulièrement  de financer  la  préparation  des  terres,  l importation de matériels  et  le  fonds  de  roulement.  Ces investissements ont permis de commercialiser des produits et sous-produits agricoles et de transformer plusieurs petites entreprises en  entreprises  de  taille moyenne,  jetant  les bases  de  la  croissance  industrielle  et  socioéconomique du Ghana.

proparco revue

Consulter l'intégralité du 13ème numéro de la revue Secteur privé et développement de Proparco, intitulé "Comment favoriser le développement des filières agricoles et agro-industrielles ?"

Avec  l abolition  des  financements  d État,  la banque a dû développer son réseau d agences, mobiliser de nouveaux dépôts et obtenir des fonds  auprès  de  bailleurs  de  fonds  multilatéraux,  principalement  le  Fonds  africain  de développement (FAD), la Banque africaine de développement (BAD) et la Banque mondiale. Pertes  de  change  (dues  à  des  réformes  du secteur  financier),  défaillances  d emprunteurs,  suppression  des  subventions  aux intrants agricoles et pertes liées aux faibles niveaux  de  production  ont  entraîné  une dégradation rapide du portefeuille de prêts de  la banque, qui a nécessité sa recapitalisation en 1990.

Dans ce contexte et suite à la levée de l obligation faite aux banques d affecter au moins un quart de leur portefeuille de prêts au secteur agricole, l ADB dont la mission était de financer l agriculture s est trouvée davantage sollicitée pour financer des investissements agricoles à court, moyen et long terme.

Tendance actuelle

Face  à  son manque  de  compétitivité  opérationnelle  dans  un  environnement  financier national et international dynamique, l ADB a entrepris de restructurer son modèle économique en 2009. Pour ce faire, elle a élaboré un plan  stratégique  à  trois  ans visant  à  aligner ses opérations sur les pratiques modernes de banque universelle afin de satisfaire aux exigences d'investisseurs, clients et actionnaires de mieux en mieux informés.

La restructuration a impliqué une révision de l'organigramme  et  de  l'organisation  afin  de mieux  satisfaire  les  clients,  de  respecter  les meilleures pratiques du secteur et d atteindre la  rentabilité. Une nouvelle équipe de  direction  a  été  recrutée  pour  actualiser  le  plan stratégique et créer de nouvelles divisions  banque d entreprise, banque de détail, financement  du développement, banque  transactionnelle, technologies.

L ADB  a  également  développé  son  réseau d agences afin de rapprocher les services bancaires  des  investisseurs,  en  particulier  dans l agriculture et l agroalimentaire. Depuis juin 2010,  22  agences  ont  été  ouvertes  (ce  qui porte le total à 91 agences) dans des collectivités  essentiellement  rurales,  tournées  vers l agriculture, et dans des centres commerciaux offrant un potentiel de production agricole.

proparco fig1 agroalimentaire ventilationDepuis la restructuration, le bilan de la banque enregistre une remarquable croissance, le total net  des  crédits  passant  de  372,86  millions (186 millions d euros) en 2009 à 576,99 millions  de  cedis  ghanéens  (288  millions  d euros) en 2010. Dans le même temps, les prêts au  secteur  agricole  ont  connu  une  progression de 64,5*%. Cette évolution a renforcé la part de l agriculture dans le portefeuille total de prêts, passée de 24,1 % en 2009 à 28,9*% en 2010, témoignage de la volonté de l'ADB de  développer  son  portefeuille  de  prêts  en faveur de l'agriculture.

Cette croissance conforte la position de leader  de  l ADB  au  niveau  national,  avec  plus d un tiers des prêts au secteur agricole. Cette réussite a été  reconnue en 2010 par Africa Investor qui lui a décerné le titre de Banque de l année en Afrique  dans le secteur agricole.  L ADB a été saluée pour ses avancées dans l intermédiation financière adaptée au secteur agricole et l expérience considérable qu elle a acquise dans ce domaine.

Le volume de  prêts  en  faveur  de  l'agriculture  approuvés par la banque au premier semestre 2011 a augmenté de près de 70 %  (hors financement de la campagne de cacao) par rapport à  la même  période  de  l exercice  précédent, consolidant  ainsi  la  position  de  leader  de l'ADB dans  le financement de  l'agriculture. Cette croissance régulière et importante des prêts en faveur de l agriculture répond à l un des principaux objectifs du plan stratégique à trois ans de la banque  accroître de 40 % la part de l agriculture dans son portefeuille de prêts d ici fin 2012. Dans le  secteur agricole,  le  sous-secteur  qui reçoit le plus d attention est l industrie agroalimentaire, qui représente près de 45 % des prêts  agricoles  signés.  Elle  est  suivie  par  la distribution (Figure 1).

LES AUTEURS >>

HENRY ALHASSAN SHIRAZU

HENRY ALHASSAN SHIRAZUDr Alhassan est Coordinateur de la mise en Suvre des politiques et de la stratégie de l Agricultural Development Bank au Ghana, responsable des prêts au secteur agricole et agro-alimentaire.

THOMAS DE GUBERNATIS

THOMAS DE GUBERNATISThomas de Gubernatis est responsable du portefeuille secteur privé et développement rural à l Agence française de développement (AFD) au Ghana.

En partenariat avec le ministère de l Alimentation  et  de  l Agriculture  et  des  bailleurs de  fonds  comme  le  Fonds  international  de développement  agricole  (FIDA),  la  BAD  et l'AFD, la banque a accompagné des agriculteurs  au  travers  de  différents  schémas  tels que le Projet de développement de la riziculture dans  les vallées  intérieures1 ou  le Programme  de  plantations  villageoises  d hévéa  (Encadré),  etc.  Elle  a  aussi  apporté  un important  soutien  à  plusieurs  initiatives publiques  telles  que  le  Programme  pour  la jeunesse dans l agriculture2.

Principaux défis

La principale difficulté de l'ADB pour financer et  accompagner  les  investisseurs  de  toutes tailles dans  le  secteur de  l'agriculture  est  la levée  de  ressources  à moyen  et  long  terme. De  fait,  il  est difficile pour  l'ADB de proposer  les  produits  financiers  adaptés  à  l'achat d'équipements  agricoles  ou  de  machines agroindustrielles  et  au  financement  du fonds de  roulement  d'entreprises  à  cycle de production long.

Le  manque  de  financement  à  terme  a d'ailleurs toujours fait obstacle au développement  régulier  du  secteur  agricole  et  de l industrie  agroalimentaire,  compromettant ainsi une croissance économique régulière du pays.

Stratégie dans le secteur agricole

Dans le cadre de sa stratégie en faveur du secteur  agricole,  l ADB  a  développé  une  gamme de  produits  financiers  spécialement  conçue pour  l'agriculture  afin  de  pouvoir  contribuer au  développement  de  chaque  filière  à  tous les niveaux. Des produits  et  facilités de prêt ont été conçus et adaptés pour répondre aux besoins de  chaque  secteur et de  chaque  type de client. Ils ont été spécialement développés pour répondre aux besoins des clients à partir de la parfaite connaissance qu a la banque des moteurs et des structures des activités sous-jacentes et des processus opérationnels en jeu.

L ADB  offre  ainsi  une  vaste  gamme  de  produits*: prêts à court, moyen ou long terme, facilités de caisse et de crédit-bail. Les principaux sous-secteurs dans lesquels l ADB est présente sont  les  cultures  industrielles  (matières  premières pour l industrie), les cultures vivrières, les cultures d exportation, l industrie agroalimentaire, la distribution agroalimentaire, les produits  pour  l agro-industrie,  les  intrants agricoles et les services agricoles.

Certaines  activités  agricoles  peuvent  être financées,  par  exemple,  par  un  prêt  sur  cinq ans assorti d un taux d intérêt spécial de 15 % (le taux de base étant de 16,75 %) qui peut être consenti  à  des  exploitants  individuels,  à  des organisations d agriculteurs, à des groupes ou à des entreprises, en faisant appel à diverses sûretés telles que des dépôts d espèces, des polices d assurance-vie,  des  propriétés  foncières,  des actifs corporels et des garants personnels.

Vision et opportunités

La vision de l ADB pour le secteur agricole est d accompagner  son  développement  et  celui de  sa  filière  en  octroyant  des  financements à moyen et long terme à visée stratégique et pérenne. Cette vision se fonde sur le potentiel considérable du secteur agricole, compte tenu des prix de la plupart des produits agricoles sur les marchés internationaux.

Cependant,  pour  concrétiser  cette  vision  et mettre les opportunités à profit, l ADB a besoin de ressources à long terme. D autre part, la création d institutions de micro-finance et la croissance des banques rurales ont progressivement érodé  le  monopole  dont  jouissait  la  banque dans le financement de la petite agriculture.

Dans une perspective de consolidation, sa stratégie pour 2011 prévoit d'améliorer et de développer  son  appui  aux  investisseurs  agricoles  sur  la base d'un système d offre de crédit efficace, et de constituer ainsi un solide portefeuille de prêts. La banque poursuivra donc  ses  efforts pour  abaisser son taux de base  déjà parmi les plus bas  et mettre ainsi le crédit à la portée des agriculteurs, des entreprises agroalimentaires et des investisseurs. Il est en outre indispensable de former et de développer le personnel de la banque pour améliorer ses performances, les processus opérationnels et la productivité. Enfin, rapprocher encore les services de la banque des investisseurs et des clients en ouvrant de nouvelles agences et enrichir la gamme de produits qui leur est proposée est un moyen  sûr  de  soutenir  les  investisseurs  nationaux, et donc une croissance économique viable.

____

  Télécharger l'intégralité de l'article et des notes de Henry Alhassan Shirazu (ADB) et Thomas de Gubernatis (AFD)

  • 1 En anglais : Inland Valley Rice Development Project . Destiné à accroître la production rizicole et le revenu des producteurs, des négociantset des transformateurs, ce projet comporte plusieurs volets : gestion des terres, crédit pour le développement des cultures, renforcement des capacités, recherche appliquée et études, gestion du projet.
  • 2 En anglais : Youth in Agriculture Programme . Il s agit d une initiative publique en faveur du secteur agricole, dont l objectif est d encourager les jeunes à se lancer dans l agriculture.